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Repenser l’absentéisme au travail
© Steve Closset

Repenser l’absentéisme au travail

L'absentéisme au travail, souvent perçu comme un simple indicateur de problèmes, cache des réalités complexes qu'il est crucial de comprendre pour agir efficacement.

De nombreux acteurs considèrent que l’absentéisme est généralement le symptôme des dysfonctionnements au sein d’une organisation. Cependant, cette vision simpliste peut mener à des analyses et à des actions inadéquates. En effet, c’est un phénomène complexe qui mérite une approche plus nuancée et multidimensionnelle pour en saisir toutes les subtilités. 

Au-delà des chiffres, la quête de sens 
Au lieu de se limiter à des stratégies défensives pour uniquement réduire le taux d’absentéisme, il est essentiel d’orienter la réflexion vers une compréhension plus profonde des raisons qui poussent les individus à s’absenter. En effet, l’absentéisme peut avoir plusieurs visages. En ce sens, il n’est pas seulement un problème à résoudre, mais un message à décoder.

On peut admettre au départ que l’absentéisme exprime une « souffrance au travail », en d’autres mots, peut constituer un indicateur de risques psychosociaux tels que le stress, le harcèlement, les mauvaises conditions de travail, ou encore la pression excessive. Il est dès lors essentiel, dans un premier temps, de décomposer le taux d’absentéisme en plusieurs paramètres (sa proportion, sa fréquence et sa durée), et d’en distinguer les motifs sous-jacents (les maladies, les accidents de travail, les congés de circonstances, etc.). En effet, cette distinction permet de mieux comprendre les dynamiques à l’œuvre et d’éviter une lecture superficielle qui pourrait conduire à des réponses inadéquates de la part de l’employeur.

La diversité des perceptions et des interprétations 
Mais cette analyse en profondeur n’est pas suffisante. L’absentéisme ne peut être pleinement compris qu’en tenant compte aussi des différentes perspectives des parties concernées, notamment les travailleurs, la hiérarchie, et les ressources humaines. Chacun perçoit et interprète les absences en fonction de ses propres préoccupations et intérêts. Par exemple, pour l’employé, cela peut-être un moyen de récupérer ou de se protéger afin de pouvoir rester performant, tandis que son supérieur peut y voir un signe de manque d’engagement ou de sérieux. Une analyse prudente de ces points de vue divergents est essentielle pour éviter les conclusions hâtives.

Les multiples facettes de l’absentéisme 
Quelques exemples parmi les nombreux contextes : 

  • Une stratégie de coping afin de tenter de gérer le stress, l’épuisement ou d’autres formes de malaise au travail. En s’absentant, on prend le temps de récupérer mentalement et physiquement.
  • Un mécanisme de protection qui permet de se soustraire temporairement à des situations de harcèlement, de conflits, ou de conditions de travail physiquement éprouvantes.
  • Un signal d’alerte indiquant que quelque chose ne va pas et exprimant un malaise ou une insatisfaction lorsque les autres canaux de communication sont perçus comme inefficaces ou fermés.
  • Un espace pour gérer des responsabilités ou des situations personnelles exceptionnelles, comme des problèmes familiaux ou des soins de santé, que l'équilibre travail - vie privée standard ne permet pas toujours de concilier facilement.
  • Une perte de motivation ou un désengagement. Il s'agit d'une manière de se détacher d'un poste déterminé où on ne trouve plus de sens ou de satisfaction, indiquant un besoin de changement ou de réévaluation de ses aspirations professionnelles.
  • Une forme de revendication implicite ou de protestation contre des conditions de travail perçues comme injustes ou inéquitables. C'est une façon de manifester son désaccord ou son insatisfaction de manière passive.

En approfondissant la compréhension des causes de l’absentéisme et en cherchant à décoder son sens, il est possible de développer des stratégies plus justes et efficaces afin d’améliorer le bien-être au travail et la performance organisationnelle.

Mélanie SAEREMANS
Psychologue- Psychothérapeute

Lire aussi :
https://www.cairn.info/revue-psychologues-et-psychologies-2012-1-page-VI.htm